Trouver le bon psychanalyste : “lacanien”, “freudien”, “jungien”..?

Quand on dit « psychanalyste », on ajoute souvent juste après un adjectif en « -ien ».
On entend ainsi parler de « psychanalyste lacanien », de « psychanalyste freudien », ou encore de « psychanalyste jungien »…

Comment s’y retrouver ?

Chaplin – Les Temps modernes

Pour tous les courants psychanalytiques,
l’idée de base est la suivante :

==> Certaines choses se jouent en nous qui échappent à notre conscience et à notre volonté.
Parfois cela déborde dans notre vie et nous fait du mal.

==> Par une certaine forme de dialogue, de rencontre, ces dynamiques pourront être éclairées, dissipées, déliées, perdant ainsi leur pouvoir de nuisance.

==> Cela a pour effet de nous rendre plus libres d’être ce que nous sommes.

 

C’est là le noyau de la psychanalyse, le point de vue fondamental commun à ses diverses orientations (voir ici).

Sur cette base, il y aura ensuite différentes approches, généralement liées au nom d’un auteur.

Concentrons-nous ici sur les trois « appellations » psychanalytiques les plus courantes : « psychanalyste freudien », « psychanalyste lacanien », et « psychanalyste jungien ». (*)

(Si vous souhaitez entrer dans le détail, vous trouverez au fil de ce blog des façons de dire autrement les grands thèmes de la psychanalyse)

Les « freudiens »

(retrouvez à ce lien l’ensemble des articles faisant référence à la psychanalyse freudienne)

On peut considérer que dire « psychanalyste freudien » est une redondance, puisque la psychanalyse est l’invention de Sigmund Freud : si on est psychanalyste, c’est que l’on est freudien, pourrait-on dire.
Et je suis assez d’accord avec cela.

Pourquoi utiliser l’adjectif « freudien », alors ? Peut-être parce qu’il existe aussi des courants psychanalytiques où la référence au cadre freudien n’est plus centrale (voir plus bas).
==> On serait ainsi « freudien » pour dire que l’on n’est pas « autre chose ».

L’œuvre de Freud est colossale et l’on ne pourra évidemment pas la résumer ici. Nous reviendrons peu à peu sur ce qu’elle contient. Certes, cette œuvre ne naît pas de rien : elle réutilise certains termes déjà en usage à l’époque et s’inscrit dans un mouvement global de son temps.

Le grand apport de Freud n’a pas été la création d’une œuvre sortie de nulle part, absolument ex nihilo : la philosophie de son siècle et la pratique psychiatrique dans laquelle il s’est formé ont évidemment contribué à nourrir son point de vue.
Non, son génie a plutôt résidé dans sa capacité à explorer jusqu’au bout des pistes iconoclastes pour son époque, dans la ténacité mise à suivre ce fil rouge et à bâtir un système cohérent de connaissance de l’inconscient.

Beaucoup de termes très employés par Freud sont passés dans le langage courant :

ex. :  « complexe », « névrose », « narcissisme », « pervers », « refoulement »…

Par ailleurs, beaucoup de termes préexistants à Freud ont pris dans sa théorie un sens différent de leur sens commun :

ex. : « sexualité », « hystérie », « censure », « sublimation »…

Quatre-vingts ans après la mort du maître viennois, on peut prendre acte de cet état de fait et utiliser ces termes avec des précautions d’usage.

Quand on dit par exemple que l’on se sent « complexé », on fait un usage élargi d’un concept qui en psychanalyse a un sens précis. Idem pour « fantasme », « hystérique », « perversion », etc.

Dans ma pratique, j’utilise couramment la théorie freudienne, sans nécessairement faire un usage explicite des termes. Plutôt devrais-je dire les théories freudiennes, car au fil des décennies Freud a remodelé son système, laissant de côté certaines constructions, en proposant de nouvelles, sans jamais réussir tout à fait à cerner l’objet de son étude : le psychisme humain.

Il me semble important de garder cette simple considération à l’esprit : la psychanalyse n’a pas réponse à tout, mais elle offre une large palette d’outils pour alléger la souffrance humaine, en alliant souplesse et cohérence.

Psychanalyste, donc freudien, oui, même si Freud n’est pas parfait !

Les « lacaniens »

Beaucoup, notamment en France, basent leur travail sur l’œuvre de Jacques Lacan, psychiatre et psychanalyste français dont l’importance a été croissant à partir des années cinquante. Lacan annonçait vouloir opérer un « retour à Freud » et ses travaux ont effectivement apporté des éclairages puissants et originaux sur les concepts du fondateur de la psychanalyse.

Accordant un intérêt particulier au rôle du langage, Lacan a proposé de nouvelles modélisations du fonctionnement du psychisme, souvent brillantes, parfois malaisées à saisir. Il ne laisse pas indifférent. Certains ne veulent pas en entendre parler et considèrent son œuvre comme une vaste fumisterie. Pour un grand nombre de praticiens, particulièrement en France, elle est au contraire un outil privilégié, riche et pertinent. Elle stimule et nourrit ainsi de nombreux groupes de réflexion et d’abondantes publications.

Du fait de désaccords théoriques et pratiques, des scissions ont eu lieu entre les différentes « écoles » ou sociétés psychanalytiques. Le temps et les logiques d’institution ont consolidé les divergences, malgré de louables efforts de rapprochement.
Une distinction s’opère ainsi couramment entre « freudiens » (supposés ne pas prendre en compte les travaux de Lacan et s’en tenir à Freud) et « lacaniens » (s’appuyant sur les travaux de Lacan et se référant de façon variable aux travaux de Freud).

Je n’utilise habituellement pas les concepts de Jacques Lacan, ni la pratique qui s’est développée dans son sillage (cela concerne la durée et la forme des séances).

Certaines formules provenant de lui (souvent dans le contexte oral de ses fameux « séminaires ») sont passées dans le langage courant, au risque de perdre la richesse qui était la leur dans le contexte original et de devenir des phrases toutes faites.

Des termes qui étaient centraux dans son œuvre ont été massivement repris, mais d’une façon souvent floue et banalisée. Je préfère dès lors ne pas y recourir (sans nier l’importance et la justesse des concepts).

Il n’empêche : je « comprends le lacanien » et nous pouvons ponctuellement recourir à ce cadre de référence s’il vous est familier.

Les « jungiens »

(retrouvez à ce lien l’ensemble des articles faisant référence à la psychanalyse jungienne)

Ah, les jungiens ! En France, c’est peu de le dire, Jung a mauvaise presse. Son nom apparaît plus souvent sur les étagères des librairies ésotériques que parmi les ouvrages de psychanalyse chez votre libraire généraliste. Alors que dans certains pays ses travaux font l’objet d’enseignements universitaires, dans l’Hexagone on le tient en grande suspicion.

Comme un effet de cette relégation, les concepts jungiens sont souvent repris de façon appauvrie et approximative par toutes sortes d’approches fort éloignées de la psychanalyse.

Si vous cherchez sur internet de l’information en français sur les termes « archétype », « anima » ou « inconscient collectif », vous avez ainsi toutes les chances de voir votre écran envahi de papillons multicolores ou d’elfes effrontés : nombre de sites à connotation « New Age » reprennent volontiers des termes du lexique jungien. Le propos peut être sincère, n’en doutons pas, mais bien souvent le fond de la pensée jungienne se retrouve travesti.
C’est bien dommage, car la pensée de Jung, érudite et rigoureuse, gagne à être découverte dans toute sa richesse.

Carl Gustav Jung, psychiatre suisse, enthousiasmé par les travaux de Freud, était entré en relation avec son homologue viennois. S’en est suivie une période de grande créativité partagée qui (je vous la fais brève) s’est terminée par une fâcherie monumentale.

Répudié par Freud, pour des divergences théoriques mais aussi – allez, maintenant on peut le dire – parce que deux personnalités aussi écrasantes se sont forcément marché sur les arpions, Jung a développé son propre système d’exploration de l’inconscient et de résolution des conflits psychiques. Son approche, qui s’est retrouvée exclue de l’orthodoxie psychanalytique, est généralement désignée sous le nom de psychologie analytique.

Je fais partie de celles et ceux qui considèrent que les travaux de Freud et de Jung ne sont pas incompatibles, et se complètent même avantageusement.

Jung a forgé des outils très puissants et efficaces pour aborder l’inconscient. Intéressé par les systèmes symboliques de différentes cultures et différentes époques, il a dégagé des constantes, des structures, des dynamiques, qui semblent régir les productions humaines.

Parmi les productions humaines qui nous intéressent spécifiquement en psychanalyse, se trouvent les rêves, « voie royale vers l’inconscient » selon Freud.
En s’appuyant sur des typologies définies par Jung, on peut effectuer un travail très concret sur la base de nos souvenirs de rêves. Un travail qui va nous ramener à notre présent et à notre pouvoir d’action.
Cet ancrage dans notre propre actualité me plaît particulièrement. Il donne au parcours de la vitalité et de l’élan, je le constate régulièrement.

==> Si l’approche freudienne est fort utile pour remarquer les résurgences du passé, les reconnaître et s’en libérer, l’approche jungienne permet de cueillir la nouveauté, la proposition présente dans le rêve.

Loin de se résumer à un exercice stérile d’interprétation intellectuelle, le recours à Freud et à Jung nous offre des moyens très tangibles d’être mieux aujourd’hui et d’envisager demain avec davantage de tranquillité. Nous aurons l’occasion de revenir là-dessus plus dans le détail.

*

J’ai évoqué ici le travail basé sur les rêves, car ils représentent un matériau privilégié qui se prête bien à la découverte du fonctionnement des mécanismes inconscients. Mais on peut travailler d’une façon semblable sur la base d’éléments très variés :

*

L’œuvre de Jung propose bien d’autres ressources, comme une grille de lecture des types de personnalités qui, si elle garde sa fonction d’instrument et n’est pas considérée comme une vérité absolue et définitive, permet d’y voir plus clair dans la façon dont fonctionnent les relations, et dans la façon dont on évolue soi-même.
Il serait vain de détailler ici : il s’agit d’outils à utiliser en contexte, avec les précautions d’usage.

Choisir son psychanalyste : votre ressenti, votre envie

Voilà un petit panorama sur quelques uns des qualificatifs couramment appliqués aux psychanalystes, sur ce qu’ils supposent, et quelques indications sur la façon dont je travaille. Je suis évidemment à votre disposition pour de plus amples informations.

Le choix du professionnel avec qui entamer un travail psychanalytique n’est pas évident à faire sur la base de l’écrit. Trouver le « bon psychanalyste » demande parfois quelques essais.
C’est aussi pour cela que je vous propose une entrevue d’une heure pour découvrir le lieu et voir ce que vous inspire ma personne.

Dès lors, et ceci reste vrai tout au long de votre parcours, c’est à vous qu’il appartient de choisir comment vous voulez être accompagné, et par qui.

 


 

(*) … Si l’on voulait être complet, il faudrait également évoquer les « kleiniens » (qui s’appuient sur les théories de Melanie Klein) : leur nombre est relativement réduit en France, mais ils constituent un courant très vivant au niveau international.
Et il y a celles et ceux qui se revendiquent de Reich, de Rank, de Winnicott, de Bion…
==> Nous aurons l’occasion de revenir sur ces noms moins connus, dont les travaux sont souvent originaux et stimulants.

La psychanalyse est potentiellement très ouverte, inclusive et dynamique. En France, ce n’est pas forcément la première impression qu’elle donne. On est d’accord.

Je vous invite cependant à garder à l’esprit que parler de « La Psychanalyse » en général ne rime pas à grand chose : il existe des psychanalyses, des psychanalystes, et tout se joue souvent sur les affinités qui vous éprouverez pour telle ou tel thérapeute, tel ou tel cadre.

Bonne route et bon courage !

 


 

 

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